
Les Amants du génome - 4 questions à Johan Heliot
#1 Quelle a été l’étincelle qui a donné naissance aux Amants du génome?
L’envie d’écrire une histoire d’amour, exercice auquel je ne m’étais jamais livré jusqu’à présent... Mais, bien évidemment, pas une “banale” histoire d’amour ! La science et la technologie devaient s’en mêler, et le décor choisi nous propulser dans un futur peu reluisant, afin de mettre les sentiments de mes personnages à l’épreuve. J’ai voulu explorer les limites d’un amour absolu, me confronter aux grands modèles imposés par les mythes et la littérature des siècles passés — la référence du titre est éloquente, ainsi que les prénoms de mes héros, Irdiss et Orfée.
#2 Quels liens faites-vous entre notre monde actuel et celui que vous avez inventé ?
Aujourd’hui déjà, les géants du Net (Google, Facebook...) investissent des fortunes dans la recherche sur l’amélioration de l’être humain, avec comme but de repousser ses limites naturelles, augmenter son espérance de vie. Ce mouvement « transhumaniste » entraînera d’importants bouleversements dans nos vies futures, ou celles de nos descendants. Mais je doute que l’humanité dans son ensemble puisse en profiter, hélas ! Car dans le même temps, les inégalités ne cessent de se creuser entre riches et pauvres, et l’état de la planète d’empirer du fait de son exploitation insensée. Nous assistons à une dégradation de notre environnement, irrémédiable, dont les premières et principales victimes sont d’ores et déjà les populations les plus démunies — et cela ne s’arrangera sans doute pas. Nous évoluons vers une société de plus en plus clivée entre une “caste” de super-riches qui profiteront des avantages du progrès technologique et le reste du monde ! J’ai symbolisé ce clivage dans le roman en opposant l’Enclave, havre quasi édénique, à l’enfer quotidien d’Europolis, mégalopole surpeuplée et surpolluée, à l’image d’une actuelle Pékin, mais située comme son nom l’indique en plein coeur de l’Europe.
#3 En creux, votre propos n’est-il pas plus intime, plus personnel ? Que vous inspire le mythe de l’amour impossible (Orphée et Eurydice, Roméo et Juliette…) ?
Plus qu’à un tableau apocalyptique du futur, Les Amants du génome s’intéresse au parcours et au portrait intimes d’amoureux éternels, du début jusqu’à la fin, et sur de très, très nombreuses années. Le temps et les épreuves, dont celle de la séparation, sont le moteur de mon double récit. Sans négliger l’action, j’ai souhaité effectuer une plongée dans la psyché — l’âme, si vous préférez — de mes personnages, confrontés au déchirement ultime. J’ai toujours été frappé par la constance de cette souffrance dans toute tragédie amoureuse, quelle que soit l’époque ou la société. C’est bien la preuve de l’universalité de cette incroyable et impérissable force qu’est l’amour. Il n’y a pas de raison qu’il en aille autrement dans le futur !
#4 Vous avez écrit plus de soixante dix romans, pour adultes ou adolescents, dans des genres différents (science-fiction, fantasy, thriller, fantastique…) ; avec Les Amants du Génome, avez-vous eu envie de mélanger les genres (romance, fresque, science-fiction…) ?
J’ai surtout eu l’ambition de mener à son terme une grande histoire d’amour, sur fond de critique sociale, comme le permet l’anticipation. Je veux que mes lecteurs vibrent et souffrent avec Irdiss et Orfée, et je serais vraiment comblé si je parvenais à leur arracher une larme finale!